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Page:Cicéron - Des suprêmes biens et des suprêmes maux, traduction Guyau, 1875.djvu/303

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XLVII
RUINE FUTURE DU MONDE.

Mais pour ne pas t’arrêter plus longtemps par de simples promesses, considère la mer, la terre et le ciel : ces trois substances, ces trois masses dont l’aspect est si différent, dont le tissu est si solide, un seul jour les verra périr, et la machine du monde, après s’être soutenue pendant un grand nombre de siècles, s’écroulera tout à coup.

Je n’ignore pas combien c’est une opinion nouvelle et incroyable que de croire à la ruine future du ciel et de la terre, et combien il m’est difficile de convaincre les hommes ; c’est ce qui arrive quand on leur apporte une vérité qui n’a pas encore frappé leurs oreilles, et qui, de plus, n’est sou- mise ni à la vue ni au tact, les deux seules voies qui portent l’évidence jusque dans le sanctuaire de l’esprit humain. Je parlerai cependant peut-être l’expérience viendra-t-elle à l’appui de mes discours ; peut-être verras-tu avant peu le globe succomber sous d’affreux tremblements. Puisse la destinée détourner de nos jours un pareil désastre, et le raisonnement, plutôt que l’effet même, te convaincre de la possibilité d’une destruction générale.

XLVIII
LES ASTRES NE SONT POINT D’UNE NATURE DIVINE.

Mais, avant de te révéler ces arrêts du destin, plus sacrés et plus sûrs que les oracles de la Pythie couronnée de lauriers sur le trépied d’Apollon, je veux prémunir ton courage par quelques vérités consolantes ; peut-être, intimidé par la superstition, crois-tu que la terre et le soleil, le ciel et la mer, les astres et la lune sont des substances divines dont l’éternité est le partage ; qu’ainsi c’est une impiété semblable à celle des Géants, et digne des châtiments les plus terribles, d’oser par de vains arguments ébranler les voûtes du monde, éteindre ce soleil qui brille dans les cieux et soumettre à la destruction des êtres immortels.