Page:Cicéron - Des suprêmes biens et des suprêmes maux, traduction Guyau, 1875.djvu/78

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du discours, les conséquences vraies ou fausses ; et d’autre part, instruits de la nature de toutes choses, nous sommes débarrassés de toute superstition, nous sommes délivrés de la crainte de la mort, nous ne sommes plus troublés par cette ignorance d’où naissent souvent d’horribles terreurs.

La morale même ne peut que gagner à la connaissance de ce que demande la nature. Alors, dirigés par cette règle qui semble descendue du ciel, et y rapportant tous nos jugements, aucun autre langage ne pourra nous convaincre. Au contraire, si nous n’avons pas la connaissance de la nature, nous ne pourrons jamais défendre les jugements des sens. Or, tout ce que nous apercevons par l’âme tire son origine des sens. Si leur rapport est fidèle, comme Épicure l’enseigne, on peut avoir une véritable perception de quelque chose ; au lieu que ceux qui disent que, par les sens, on ne peut avoir de véritable perception, et qui les récusent pour juges, sont incapables, une fois les sens mis à part, d’expliquer même ce qu’ils veulent dire. Enfin, sans l’étude et la science des choses de la nature, il n’y aurait rien sur quoi on pût fonder la conduite de la vie. C’est de là qu’on tire la fermeté d’esprit contre la peur de la mort et contre la superstition ; en pénétrant dans les secrets de la nature, on parvient à avoir l’esprit tranquille ; en approfondissant bien ce que c’est que les passions, on devient modéré : enfin, comme je l’ai démontré naguère, on arrive à posséder la règle de la connaissance qui donne la rectitude au jugement et apprend à distinguer le vrai du faux.