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MADAME ROLAND

Sept mois plus tard Mirabeau traitait avec la cour.

Peu après, elle émet dans une lettre à Bancal la première conception du camp de Paris que Servan fera adopter en juin 1792. En août 1790, elle plaide ardemment pour la liberté de la presse, la liberté indéfinie, et la loi ne sera votée qu’en avril 1796.


Roland, revenu à la santé, ne restait pas inactif et, en mars 1790, s’était fait élire membre du Conseil Général de la Commune. Roland trouvait-il que sa femme écrivait mieux que lui dont le style était curieusement obscur et rocailleux ? C’est probable. Ce qui est certain, c’est qu’à partir de cette époque, ce fut elle qui rédigea toutes les pièces rendues publiques signées du nom de Roland. Mais tout démontre qu’elle ne chercha jamais à pousser son mari au second plan. Loin de là, c’est avec la spontanéité la plus naturelle qu’elle le met toujours en avant, proclame l’amour qu’elle lui porte et la soumission qu’elle lui doit, loue en toute occasion sa « rigide probité », l’« austérité de ses mœurs », l’« inflexibilité de son caractère », son « âpreté à combattre les abus ». L’indépendance, le désintéressement sont les lois du ménage. Par application d’un système qu’elle pousse aux extrémités, elle ne s’embarrasse, à la lettre, d’aucune considération dans la voie où elle s’est librement engagée pour la recherche du juste et du vrai. Nous verrons qu’elle ne fléchira pas.


Des émeutes avaient éclaté à Lyon après la suppression des octrois prêchée par Roland.

La voix publique accusait celui-ci de fomenter l’insurrection et « débitait mille atrocités sur son compte ». À Villefranche, son domestique était arrêté dans les rues et « interrogé s’ils n’ont pas peur d’être pris ». Mme Roland est accusée d’avoir visité tous les galetas de Lyon et répandu de l’argent chez les malheureux pour les engager à la révolte. Au vrai elle vit d’une manière si retirée que personne ne la connaît et, quant à Roland, « beaucoup de gens le prennent pour un abbé, soit à cause de son costume, soit pour sa mine discrète ». Mme Roland empêche