Page:Cléri - Le Crime de la chambre noire, 1915.djvu/4

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Pourquoi ces dénominations lugubres ? Pour plusieurs raisons. D’abord, cette chambre n’était éclairée que par une unique fenêtre très étroite devant laquelle se dressaient des arbres touffus qui interceptaient la lumière et qui, le jour même, plongeaient la pièce dans une obscurité épaisse. D’autre part, on disait que c’était dans cette chambre que le dernier baron, Gaspard de Sauré, seigneur farouche et redouté dans toute la contrée, avait à l’instar de Barbe Bleue, tué trois de ses épouses. Et, comme pour confirmer la triste réputation dont jouissait cette chambre, c’était là aussi que la sœur aînée de Judith Mauvin avait été trouvée poignardée par une main inconnue trois ans auparavant, sans que l’on expliquât le mobile de ce meurtre et sans que l’on découvrît jamais le coupable. Les paysans superstitieux, établissant un parallèle entre les crimes anciens et le nouveau, avaient attribué à la « Chambre Fatale » un pouvoir funeste. Bien plus, il se trouva certains esprits pour prétendre que le spectre du feu baron hantait l’antique demeure et renouvelait ses crimes sur des âmes vivantes. Or cette version acquit un semblant de véracité à la suite des faits étranges que nous allons relater brièvement. De son vivant, le baron Gaspard de Sauré, en raison de son grand amour pour la chasse et aussi à cause du justaucorps écarlate qu’il portait, avait été surnommé le « Chasseur Rouge »