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Page:Claretie - Erckmann-Chatrian, 1883.pdf/45

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consciente ou cherchée, dans le prurit de sauvagerie, dans ce déchaînement des instincts de la bête humaine, ceux-là sont rares, mais dignes d’estime, dont on peut dire, comme d’Erckmann-Chatrian : « Ils ont toujours mis une ferme conscience artistique au service d’idées saines et qu’ils croient justes. » Encore un coup, l’œuvre d’Erckmann-Chatrian, cette légende d’un coin de terre, cette histoire de leur vieille province, — chère patrie dans la patrie, — cette œuvre est essentiellement moralisatrice et d’un art profond qui se dissimule sous les dehors simples. Oui, un tel art est grand, et il est difficile ! Comment se fait-il, en effet, qu’on pastiche avec une facilité prodigieuse l’affecté, le truculent, le tarabiscoté, le gongorisme de la littérature picturale, tandis qu’on ne saurait imiter la naïveté, le ton simple, la précision savante de ces deux hommes ? Ceux-là n’ont pas voulu écrire pour les lettrés, pour les désœuvrés, pour les curieux, les blasés, ils ont écrit pour les petits, pour les humbles, pour les ignorants. — Et, résultat qui donne raison à toutes nos théories artistiques, il s’est trouvé que la perfection de leurs livres étant d’autant plus grande, je le répète, que leur sincérité et leur simplicité