Page:Claretie - Petrus Borel, le lycanthrope, 1865.djvu/36

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Il ajoutait, en vers cette fois :

Car la société n’est qu’un marais fétide
Dont le fond, sans nul doute, est seul pur et limpide.
Mais où ce qui se voit de plus sale, de plus
Vénéneux et puant, vient toujours par-dessus !
Et c’est une pitié ! c’est un vrai fouillis d’herbes
Jaunes, de roseaux secs épanouis en gerbes,
Troncs pourris, champignons fendus et verdissants.
Arbustes épineux croisés dans tous les sens,
Fange verte, écumeuse, et grouillante d’insectes,
De crapauds et de vers, qui de rides infectes
Le sillonnent, le tout parsemé d’animaux
Noyés, et dont le ventre apparaît noir et gros.

Le tout pour rire, n’en doutez pas, et pour le plaisir d’arriver premier dans ce steeple-chase à l’originalité qu’on avait alors affiché dans ce nouveau cénacle. Ils étaient là tous, en effet, un groupe ardent, bouillant, spirituel ; enragés de nouveauté, de curiosité, de couleur et de rimes riches, enfiévrés de rénovation, de formules non vieillies, de phrases non clichées. Affiliés à la Marianne romantique, ils avaient juré haine et malheur à cette société de bourgeois, à cet art de philistins, à cette littérature de gens