Page:Claretie - Petrus Borel, le lycanthrope, 1865.djvu/42

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le plus original, le plus séduisant des folles mœurs de ce petit clan[1].

Mais on se lasse de tout. Ils se lassèrent de l’atelier de Jehan Duseigneur, Pétrus Borel surtout, l’homme assoiffé de solitude. En ce temps-là, il s’était épris déjà de belle passion pour Robinson et Vendredi ; il rêvait, l’ambitieux, l’île déserte souhaitée par nous tous au lendemain d’une

  1. Il y a eu à cette époque et un peu auparavant une série d’associations, de réunions, de clans littéraires, puisque j’ai dit ce mot, qui désormais appartiennent à l’histoire. Il y eut le cénacle où M. Sainte-Beuve, les frères Deschamps, Victor Hugo, complotèrent la révolution romantique ; — il y eut les repas politiques des Marseillais de Paris, Alphonse Rabbe, Thiers, Mignet ; — il y eut les réunions dont parle Étienne Delécluze dans ses Souvenirs, et où fraternisaient Loyson, Stapfer, M. Patin, les rédacteurs du Courrier français ; il y eut la Childebert où se réunissaient les jeunes peintres et d’où partit cette charge énorme du nez de Bouginier qui fit le tour du monde ; deux ans plus tard Arsène Houssaye devait fonder cette autre académie libre et charmante de la rue du Doyenné. On savait autrefois se réunir et s’entr’aider ; on vit seul aujourd’hui. Plus de fourmilière ; chacun, hélas ! est un formicaleo qui attend sa proie et la dépèce comme il peut.