Page:Claretie - Petrus Borel, le lycanthrope, 1865.djvu/81

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À cet instant huit heures et las oraciones sonnent au couvent prochain ; les deux furieux se séparent et tombent à genoux.

La scène est vraiment belle et dramatique, l’idée saisissante. Voyez-vous ces rivaux sanglants, hideux, agenouillés côte à côte, leurs navajas rouges à la main ? Barraou dit les versets, Juan les répons, puis, quand les oraisons sont finies :

« Allons ! debout, Cazador, que fais-tu encore à genoux ?

— Je priais pour votre âme.

— Il n’est besoin ; j’ai prié pour la tienne : en garde ! »

Aussitôt il lui crève la poitrine, le sang jaillit au loin ; Juan pousse un cri et tombe sur un genou, saisissant à la cuisse Barraou qui lui arrache les cheveux et le frappe à coups redoublés dans les reins ; d’un coup de revers il lui étripe le ventre. Terrassés tous deux, ils roulent dans la poussière ; tantôt Jaquez est dessus, tantôt Juan : ils rugissent et se tordent.

L’un lève le bras et brise sa lame sur une pierre du mur, l’autre lui cloue la sienne dans la gorge. Sanglants, tailladés, ils jettent des râlements affreux et ne semblent plus qu’une masse de sang qui flue et caille.

Déjà des milliers de moucherons et de scarabées