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que la terre des guinguettes et des romances. Et elle accepte aussi cette manière de voir et d’entendre ; elle se prête à tout ; indifférente, elle offre à chacun de nous ce qu’il lui plaît de prendre, parmi les beautés diverses dont les siècles l’ont accablée. À Claude Debussy, elle réservait la confidence du Printemps, qui est le poème des feuillages caressés de soleil, des sources fraîches à l’ombre des collines, et de la lumière flottante.

Cette suite symphonique en deux parties, pour orchestre et chœurs, évoque déjà, avec ses mélodies claires et ses langueurs chromatiques, le site où plus tard, à l’instigation de Mallarmé, se dessinera le Faune désireux des Nymphes vaines. Mais deux innovations déplurent aux musiciens de l’Institut : l’attribution aux voix d’un rôle instrumental, sans paroles, et le ton de fa dièze majeur. « On n’écrit pas en fa dièze majeur pour l’orchestre », dit le plus célèbre d’entre eux, sans se douter qu’il reprenait à son compte un mot du bon Lecerf de Viéville, épouvanté, en 1705, d’entendre un claveciniste jouer en « fa ut fa dièses tierce majeure »[1]. Cet envoi de Rome, qui date de 1887, ne fut donc pas agréé ; ce n’est qu’en 1904 qu’il a été

  1. Comparaison de la musique italienne et de la musique française, t. iii, p. 90.