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apaise des scrupules ; sa prière est anxieuse ; dans le temps qu’elle implore, elle interroge, et s’effraie du silence ; son âme sans malice est cependant une âme en peine, qui appelle douloureusement son sauveur, et se jette, tremblante, dans un espoir passionné. De là, malgré des chants modestes comme des cantiques et des fugues sans complaisance, une agitation fiévreuse, qui contraint le saint homme à se mettre en scène, lui aussi, pour nous entretenir longuement de ses inquiétudes ; le sujet lui tient si fort à cœur qu’il ne craint jamais de nous importuner, ou de nuire à la beauté de l’œuvre. C’est un romantique à sa manière, qui est sans apprêt, patiente, obstinée, dévote. Chez lui l’élévation de la pensée fait tout oublier. Mais ce qu’il enseignait, sans trop le vouloir, du reste, c’est une austérité sentimentale dont les meilleurs de ses disciples, comme Ernest Chausson, devaient avoir beaucoup de mal à se défaire.

Les ouvrages inspirés de Franck ou de Wagner étaient condamnés aux tristes honneurs du succès d’estime. Au contraire, la formule tant décriée, et si achalandée, de Massenet, qui d’ailleurs l’a empruntée à Gounod, était assurée de plaire au grand public. Ici l’on pêche par défaut, et non plus par excès. La vérité n’est jamais atteinte ; tout s’atténue et s’alanguit ; c’est un sourire perpétuel ; le chant se courbe avec une