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complètement. Encore est-ce avec le seul Parsifal, l’œuvre de paix et de renoncement, qu’on peut lui trouver quelque parenté : c’est le mouvement général, un peu lent et solennel ; c’est le caractère de l’orchestre, qui, malgré sa délicatesse, a ici de l’onction. Mais la mélodie est d’une netteté que Wagner n’a jamais atteinte, et presque toujours se détache en pleine lumière, au-dessus des harmonies murmurantes ; le chant ignore ces grands écarts et ces accents impératifs, propres à la langue allemande et imprudemment copiés par tant de nos musiciens ; même lorsqu’il reprend les thèmes d’abord énoncés par les instruments, leur simplicité lui permet de rester naturel ; le développement est toujours arrêté juste au point où il deviendrait factice ; or, Wagner, par principe, dépasse ce point toujours. Surtout, il n’a pas connu cette candeur céleste : il n’est pour rien dans l’idée même de l’ouvrage, et ne lui a fourni que certaines figures de style. On s’explique ainsi que, par la suite, ces marques légères se soient effacées sans laisser aucune trace.

Les musiciens russes ont certainement aidé Debussy à se déprendre de Wagner. Après les brumes dont le Graal et le Walhall s’environnent, il aime leur orchestre de mosaïque, et c’est par goût que, le 20 janvier 1894, au concert de la Société Nationale,