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disloquent le vers et fortifient la rime ; à chacune de leurs hardiesses, ils reculent d’horreur, car ils se croient maudits. C’est justement parce qu’ils se sentent mal libérés qu’ils luttent avec tant d’effort ; menant leur sensations à l’assaut de leur raison, ils les excitent et les grossissent ; le tumulte de cette guerre est la seule harmonie qu’ils connaissent ; et tout en eux n’est qu’opposition, contraste et antithèse. On se lassa de cette inquiétude perpétuelle, et la doctrine de Parnasse vint rétablir la paix, mais non sans sacrifices : ce fut un retour délibéré à des formes de vers fixes, à peine plus variées que celles de la poésie classique, et beaucoup plus rigoureuses, surtout sur le chapitre de la rime. Ainsi, tout ce que gagnèrent, en fin de compte, les romantiques, ce furent quelques règles de plus. Et de cette poésie réasservie il va sans dire que tout sentiment personnel fut exclu de nouveau : mais comme la raison, après le romantisme, était un peu décriée, on n’y put revenir, et l’on assigna à l’art des vers, comme but unique, la peinture des objets matériels. Tous les Parnassiens furent descriptifs à outrance ; d’ailleurs bons ouvriers, à qui la difficulté de leur métier fait souvent un style aux reliefs de médaille. Il ne leur manque aucune qualité, que le mouvement, qui seul donne la vie.