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à la façon d’un toréador en garde, que de rompre brusquement le charme par un coup de poing ou une grimace.

Les chefs d’orchestre feront bien d’oublier Berlioz et Wagner aussi complètement qu’il se pourra ; pas de contrastes ici, ni surtout de ces déchaînements sentimentaux où par malheurs nos instrumentistes, pervertis par leur répertoire, s’abandonnent dès que l’expression leur est demandée. Inutile également de chercher à modifier la perspective, comme on le fait si volontiers pour les classiques ; les brandisseurs de baguette tirent à leur gré tel ou tel timbre de la masse orchestrale pour le mettre au premier plan : l’un préfère le cor ou l’autre favorise le violoncelle ; un troisième s’avise d’aller chercher la clarinette, qui n’a qu’une note à faire, et le voila passé maître à son tour. Il faut se persuader qu’ici, comme d’ailleurs en tout ouvrage congrûment orchestré, chaque détail est à sa place et ne doit pas la quitter ; il a été calculé pour l’impression d’ensemble, que la moindre altération de l’équilibre compromettrait.

Les pianistes devront renoncer à la prétention de « marquer le chant » ; bien compris, il prendra de lui-même le léger relief qui est nécessaire ; insister serait tomber dans l’affectation romantique. Mais ils ne devront pas d’avantage attirer l’attention sur ce qu’ils