Page:Claude Farrère - Les civilisés, 1905.djvu/169

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des plaisirs à mon goût ; je les cueille. Je vis comme il me plaît, sans souci de rien, ni de personne. C’est toi qui m’as dicté ce programme !

— Imbécile ! »

Torral l’injuriait sans colère, avec une grimace de pitié.

« Imbécile ! Ne discutons pas. — Es-tu amoureux ? Ce ne serait pas une excuse, mais une explication… »

Une révolte s’insurgea dans Fierce. Tous les reproches, toutes les railleries, il les acceptait tête basse. Mais le nom de Sélysette Sylva profané ici, jamais ! — Au fait, — Il réfléchit tout à coup, — pourquoi s’irriter ? Qui parlait de Sélysette ? Il n’était pas amoureux, pas plus d’elle que d’aucune femme au monde. Il rit.

— « Amoureux ! Et toi ? »

Torral le scrutait d’un regard fouilleur. Mais Fierce ne mentait pas ; sa bonne foi souriait dans tout son visage. Torral n’insista pas.

— « Je vais chez Mévil, dit-il en reprenant ses vêtements de jour quittés pour la sieste. Viens-tu ?

Fierce consulta sa montre.

— « Oui. J’ai le temps.

— Le temps ? Qu’as-tu à faire ?

— Une partie de tennis.

— Où ?

— Chez les Malais. »

Fierce ne rougissait plus : Il n’était pas amoureux ; ce point nettement formulé rassurait et calmait sa