Il s’interrompit devant la mine anxieuse de Fierce.
— « Vous avez vu Mlle Sylva, j’espère ?
— Non, elle est au Cap…
— Bon ! mon pauvre enfant, la guigne est pour vous. Au Cap ! Vous n’aurez pas le temps d’y aller. L’arsenal a mis votre Avalanche en état, et vous partez ce soir.
— Je pars ?
— Pour le Grand Lac. Tout le Cambodge est à feu et à sang, et les Siamois s’en mêlent. Les dépêches sont arrivées cette nuit. Une révolte sérieuse, et trop soudaine : il y a de l’argent anglais là-dessous. Je l’ai prédit, c’est le commencement de la fin… »
Il enfourcha son dada favori, et prophétisa des catastrophes. Le fiancé de Sélysette, immobile et silencieux, n’entendait pas.
— « Amiral, dit-il soudain, le Bayard reste à Saïgon ? Vous verrez Mlle Sylva… »
Le vieil homme s’arrêta net, et, tendrement, appuya ses deux mains sur les épaules de Fierce.
— « Je la verrai. Allez tranquille : elle saura ; elle attendra. »
Hélas ! ce n’était pas de sa patience à elle qu’il doutait, ni de sa fidélité.