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sans [p. 687] aucun ornement, luy recommandant quand la cérémonie seroit finie de la garder jusques à ce que l’enfant put atteindre un aage convenable pour le luy donner et rappeler par ce moyen dans la mémoire les promesses qu’il avoit faites. Ayant fait cette cérémonie selon le désir de sa sœur en présence d’une assemblée très considérable il fit un fort beau discours sur l’excellence du baptesme, et s’étendant sur chacune des cérémonies en particulier, et principalement sur les promesses que l’on fait à Dieu, il saisit toute l’assistance qui demeura d’accord de n’avoir jamais entendu parler du sacrement en cette manière et avec cette force, et qui dit qu’il seroit à souhaitter que les prédicateurs et les curés prissent à tâche d’en instruire les fidèles puisque c’est le fondement de tout l’édifice du christianisme.[1] Il se trouva mesme des ecclésiastiques à la ditte cérémonie qui avouèrent après l’avoir entendu que, bien loin de connoistre les engagemens de leur état, ils ne savoient pas encore ce qu’estoit d’estre chrestien. Le clergé de la parroisse en fut si touché qu’il se convertit entièrement.

Les médecins de Paris, consultez sur ses infirmitez furent d’avis qu’il quittast loin de Paris pour aller en province auprès de ses parens afin d’y prendre le lait d’ânesse. Il vint à Laon chez la conseillère Tourtebatte sa sœur[2] où il prit le remède, mais n’ayant rien voulu rabbattre de sa dévotion et de ses exercices il ne luy fut d’aucune utilité. Il se levoit régulièrement à trois heures les jours qu’il prenoit son remède, alloit au couvent de la Congrégation où il avoit une sœur religieuse,[3] dire la messe à quatre heures après quoy il venoit prendre son remède et continuoit de la sorte ses exercices. Estant dans cette grande infirmité il prenoit plaisir à instruire la jeunesse, et voyant que le vicaire de S. Julien, qui était un jeune ecclésiastique de bonnes mœurs, n’osoit entreprendre de faire les catéchismes, il les commença luy-mesme et le forma à cet exercice de manière qu’il devint fort capable et remplit depuis ce temps-là une des principales cures de la ville. Il se trouva dans la ditte église un caveau souterain où S. Genebaud premier évêque de Laon et neveu de S. Remy fit pénitence. Il aymoit ce lieu et en faisoit ses délices. Il s’y retiroit très souvent et y venoit toutes les fois deux heures de suitte pour y méditer et y faire de grandes mortifications nonobstant son état de langueur et d’infirmité.

  1. Beuvelet n’hésite pas à présenter chacun des sept sacrements comme ayant l’importance du « premier fondement du christianisme », Cela signifie qu’il était convaincu de la valeur irremplaçable de chacun car chacun jouait un rôle qu’aucun autre ne pouvait suppléer. Il insistait parce que les mentalités protestantes, influentes dans la région, considéraient certains sacrements catholiques comme superfétatoires.
  2. Il s’agit de Barbe Beuvelet.
  3. Les minutes du notaire Delacampaigne (alias De La Campaigne ou de la Campagne) relatives à la Congrégation Notre-Dame de saint Pierre Fourier renferment des actes signés de Sœur Angélique Beuvelet, au cours de l’année 1681, par exemple (AD Aisne, 100 E2, fo 35v, 65).