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chap. iv. — proportion des armes.

par conséquent jamais être regardé comme constituant une disproportion dans le sens propre du mot. Cependant il est indirectement nuisible, parce qu’il augmente dans de fortes proportions les difficultés de l’entretien de l’armée. Il ne faut pas oublier, en effet, que 10 000 cavaliers que l’on a de trop coûtent, au point de vue de l’organisation et de l’entretien, autant que 50 000 fantassins que l’on pourrait avoir à leur place.

Ces caractères particuliers qui résultent de la prédominance d’une arme sur les deux autres dans leur action combinée, ont d’autant plus d’importance au point de vue de l’application et de l’étude des enseignements de l’art militaire, que cet art ne traite uniquement que de l’emploi des troupes qui sont réellement mises en ligne, et qu’il ne dépend guère du général en chef de changer les proportions établies dans l’armée lorsqu’il en prend le commandement.

Nous allons donc chercher à nous rendre compte des modifications que la prédominance de l’une ou de l’autre des trois armes peut imposer à la conduite de la guerre.

Un excès en artillerie imprimera aux entreprises un caractère plus passif qu’actif. On recherchera particulièrement les fortes positions, les grandes coupures de terrain, les montagnes même. On confiera ainsi aux obstacles naturels la protection et la défense des nombreuses bouches à feu dont on disposera, et, s’appuyant sur la grande force du mode défensif, on attendra que l’ennemi se présente et s’expose, de lui-même, à l’effet destructeur d’un feu formidable. Toute la guerre prendra une allure grave et méthodique.

Par contre, une insuffisance en artillerie nous fera choisir le principe de l’action et du mouvement ; le mode offensif en un mot. Les marches, les fatigues, les efforts deviendront des armes pour nous. La guerre