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Page:Clausewitz - Théorie de la grande guerre, I.djvu/361

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les forces armées.

tant toujours en situation de livrer un combat général, on peut, dans un pays moyennement peuplé, c’est-à-dire où l’on compte de 2 000 à 3 000 âmes par mille carré (50 kilomètres carrés), faire marcher une armée de 150 000 combattants sur un front suffisamment restreint, avec la certitude que les communes seront en mesure de subvenir à la subsistance des troupes pendant une ou deux journées, ou, en d’autres termes, que l’on peut maintenir cette armée en marche ininterrompue, sans avoir recours pour assurer ses vivres et ses fourrages à des magasins ou à des dispositions préparatoires.

C’est sur ces principes que furent basées les entreprises des Français pendant les guerres de la Révolution et de l’Empire.

Leurs armées se sont ainsi portées de l’Adige sur le Danube et du Rhin sur la Vistule, sans faire pour ainsi dire usage d’un autre système que de celui de la subsistance chez l’habitant, et sans que jamais elles aient eu à souffrir de cette méthode. Comme d’ailleurs ces entreprises étaient appuyées d’une grande supériorité morale et physique, ou pour le moins étaient toujours conduites avec audace et résolution, elles portaient en elles-mêmes le germe d’un succès presque certain, et le Dieu de la victoire ne cessa guère d’accompagner les Français dans leur marche ininterrompue.

Cependant les circonstances ne sont pas toujours aussi favorables ; la population peut être moins nombreuse ou présenter plus d’artisans que de cultivateurs, le sol peut être moins productif, les localités peuvent avoir été déjà épuisées par des contributions antérieures. En pareils cas les résultats qu’amènera cette manière de procéder à la subsistance des troupes seront naturellement inférieurs. Mais si l’on se rend