Page:Cleland - La Fille de joie (éd. 1786).djvu/34

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
( 16 )

bre pendant qu’on me feroit des habits convenables à l’état que je devois tenir auprès de ma Maîtreſſe : mais ce n’étoit qu’un prétexte. Madame Brown ne vouloit pas que perſonne me vit juſqu’à-ce qu’elle eût trouvé marchand pour mon pucellage, que ma ſimplicité lui faiſoit juger que j’avois encore.

Depuis le dîner juſqu’au ſoir, il ne ſe paſſa rien qui mérite d’être rapporté. L’heure de la retraite étant arrivée, nous montâmes chacune à notre appartement. Phébé, qui s’apperçut que j’avois de la honte à me deshabiller en ſa préſence, m’enleva dans la minute mouchoir de cou, robe, & cotillons. Alors rougiſſant de me voir ainſi nue, je me fourrai comme un éclair entre les draps, où la commere ne tarda pas à me ſuivre. Phébé avoit environ vingt-cinq ans, & en paroiſſoit dix de plus par ſes longs & fatigans ſervices ; ce qui l’avoit réduite au métier d’appareilleuſe avant le tems.