Page:Cleland - La Fille de joie (éd. 1786).djvu/86

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la main & l’éveillai. Il parut d’abord étonné & comme fâché que j’euſſe interrompu ſon ſommeil : mais après m’avoir conſidérée, il me demanda quelle heure il étoit ? Je le lui dis, & j’ajoutai que je craignois qu’il ne s’enrhumât en reſtant ainſi expoſé à l’air. Il me remercia, avec une douceur qui répondoit admirablement à celle de ſes yeux. Il ne doutoit pas que je ne fûſſe une des penſionnaires du Bercail, & que je ne vinſſe pour lui offrir mes ſervices. Néanmoins, ſoit qu’il craignît de m’offenſer, ſoit que ſa politeſſe naturelle le retint dans les bornes de l’honnêteté, il me parla le plus civilement du monde, & me donnant un baiſer, il me dit que ſi je voulois paſſer une heure avec lui, je n’aurois pas lieu de m’en repentir. Quoique mon amour naiſſant m’y invitât, la crainte d’être ſurpriſe par les gens de la maiſon me retenoit.

Je lui dis que, pour des motifs que je n’avois pas le loiſir de lui expliquer,