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DÉMOSTHÈNE

languissant des Athéniens en leur rappelant Marathon et Salamine. Il forme des alliances et des confédérations entre tous les Grecs et les excite à se liguer contre nous. On ne peut se dérober à sa vigilance, on ne peut le tromper par des subterfuges, et il est impossible de l’acheter. Ce que furent autrefois pour les Athéniens Thémistocle et Périclès, Démosthène l’est aujourd’hui pour ses concitoyens… C’est en l’écoutant qu’ils se sont rendus maîtres de l’Eubée, de Mégare, des côtes de l’Hellespont et de la Béotie… Si les Athéniens rendaient un tel homme maître absolu des munitions, des vaisseaux, de l’argent et des circonstances, je craindrais que bientôt il ne me mit en danger de lui disputer la Macédoine, lui qui, ne pouvant aujourd’hui me combattre qu’avec des décrets, m’environne cependant, de toutes parts, me surprend, trouve des ressources pécuniaires, rassemble des forces, enrôle des troupes, se transporte de tous côtés pour s’opposer à mes desseins.

Qu’aurait-on pu dire qui ne fût au-dessous d’un tel témoignage de l’homme le plus qualifié pour juger du héros ? Dans le plus pur relief d’une puissance de nature en pleine envolée, le bon combattant nous est présenté par l’antagoniste même dont l’autorité s’impose dès qu’il se trouve capable de juger de haut. Qu’importe, après cela, la technique des moyens de Démosthène ! C’est l’homme que nous cherchons, c’est l’homme que nous trouvons avec ses passions, ses rugissements de bataille, au travers des froides résolutions d’un esprit composé. L’Hellénisme n’a pas de plus