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était envoyé dans cette île lointaine en mission, par le secrétariat des colonies ; il y étudia le système colonial hollandais, et, au retour, publia sur Java et sa colonisation, quelques articles dans la Revue scientifique et d’autres publications. Il passa un an à Toulouse (1891), puis revint à Montpellier, reprendre la direction politique de la Dépêche, pour l’Hérault, et sa collaboration.

En1891, Ricard fit paraître, chez Lemerre, avec une préface, les poésies posthumes, françaises et languedociennes, de Lydie Wilson, sous le titre choisi par elle-même : Au Bord du Lez. Le Lez est un petit fleuve qui passe près de Montpellier. Plusieurs de ces poésies avaient paru dans la Lauseto, sous les pseudonymes de Ma Dulciorella el Lidia Colonia.

La même année, il donna, chez Savine, Autour des Bonaparte, fragments de mémoires de son père, le général de Ricard. Il mit en tête une importante Introduction, qui montre à la fois ses débuts de parnassien et de républicain, et de curieux dessous de la fin du second empire,

L’Esprit politique de la Réforme (Fischbacher, 1893) fut une mise au point des complicités luthériennes avec les despotes allemands et des efforts calvinistes vers une organisation démocratique. En Suisse, en France, « la Réforme tendait logiquement à une république fédérale. » Mais tous les partis d’oppression, les rois, les papes, les jésuites qui mirent en une méthode serrée, redoutable, les formules flottantes du gouvernement implacable de l’Église, se liguèrent contre ces protestants revenus à la simplicité, à la liberté, à l’égalité des premiers chrétiens. C’est politiquement que la Réforme fut vaincue, et elle le fut à lorce de supplices, de bûchers, de massacres ; au nord, elle prit fin par la Saint-Barthélemy ; au midi, par l’abdication d’Henri IV. Ainsi, toujours, « la France semble condamnée à se recommencer sans cesse, à essayer, à tout instant, de superbes renaissances qui meurent, après des efforts héroïques, étouffées par les réactions. » — L’édit de Nantes ne fut qu’un palliatif ; d’ailleurs, les jésuites, rappelés, s’unirent sourdement au despotisme, et obtinrent de Louis XIV la révocation de cette mesure relativement libérale. Dans sa conclusion, l’auteur montre que la Réforme ne fut pas un système mais un esprit ; elle lutta contre l’arbitraire, développa la science, agit en force destructive jusqu’à l’acte suprême : la Révolution française ; et dans le midi, son idée renferma le principe hostile à la centralisation absolutiste, le germe du fédéralisme. — Ce livre met en lumière la Réforme, que des historiens n’ont présentée que superficiellement ; où l’y voit naître par des circonstances logiques, écrasée par tous les despotismes alliés contre elle, et cependant restée vivante jusqu’à féconder puissamment nos révolutions.

Ricard, vers ce temps-là, publia encore (chez Bernard et Cie) la Colère, un roman dont le titre est une description ; disons seulement qu’il s’agit d’un tempérament féminin. Il écrivit la préface des Ébauches de Robert Bernier, et surtout publia dans la Dépêche une série d’articles de revendications fédéralistes et méridionalistes, qu’il a l’intention de réunir en volumes. Il collabora durant celle période active, à des journaux et revues dont il ne