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Page:Coignet - Aux Vieux de la vieille, 1853.djvu/44

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Voilà tout ce que je vis du 18 brumaire.

Quelque temps après, le bataillon auxiliaire de Seine-et-Marne, dont je faisais partie, fut dissout, et on l’amalgama dans la 96e demi-brigade, commandée par le colonel Lepreux.

Les grenadiers de cette brigade étaient casernés au Luxembourg, dans la portion du jardin qui fait face à l’Odéon. À cette époque, il n’y avait là que des masures qui venaient presque jusqu’au palais ; et une chapelle, élevée de plusieurs marches, précédée par une rangée de tilleuls ; puis derrière, une sortie qui existe encore et qui débouche dans la rue d’Enfer.

Nous étions campés dans la chapelle, et nos marmites établies dans une grande salle voütée qu’on nous dit être la sacritie.

Un jour, le colonel nous fit prendre les armes pour recevoir lieutenant dans notre compagnie, M. Thomas Thomé. C’était un bel homme, doux, brave garçon, mais insouciant, aimant le plaisir, plus propre à faire un soldat qu’un officier. Il nous raconta que lui et un de ses camarades avaient sauvé la vie de Bonaparte à Saint-Cloud. La première fois, disait-il, qu’il est entré dans la salle, deux des membres de l’assemblée ont foncé sur lui avec des poignards, et c’est moi et mon camarade qui ont paré les coups. Il est sorti au milieu des cris de hors la loi, C’est alors qu’il a tiré son épée, qu’il a fait croiser la baïonnette et qu’il leur a crié : Hors la salle ! Tous les pigeons pattus se sont sauvés