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Page:Coignet - Aux Vieux de la vieille, 1853.djvu/82

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la poudre, déclarèrent qu’ils ne pouvaient supporter celle-là. Ils refusaient de continuer leur service et pour s’en débarrasser, ils poussèrent l’âne et la femme dans le Pô. On leur laissa prendre un bain de quelques minutes et on les retira ensuite. La pauvre cantinière fut chassée du régiment. Son malheur excita les regrets de celui même qui était venu se plaindre d’elle. Avant de retourner à son château, il lui donna une bourse pleine d’argent.

Nous passämes le Pô et nous arrivâmes à Crémone, où nous devions tenir garnison pendant les trois mois de trève. C’était une grande ville, entourée de remparts et qui pouvait se défendre contre un coup-de-main. Mais c’est la plus mauvaise garnison de l’Italie. Nous étions couchés sur de la paille en poussière, et dévorés par la vermine. Voulant détruire celle qui me rongeait, j’eus l’idée de faire une cendrée dans une grande chaudière, et de plonger ma veste et ma culotte de tricot dans cette espèce de lessive. Quel malheur pour moi ! Mon drap et mon tricot furent littéralement brûlés, à tomber en lambeaux ; et comme j’avais laissé mon sac sur le champ de Marengo, j’étais exposé à me promener tout nu, comme la pauvre cantinière. Il fallut que mes camarades vinssent à mon secours, et, grâce à leur bonne amitié, je me tirai d’embarras tant bien que mal.

À ce moment, je résolus d’écrire à mon père et à mon oncle pour leur faire part de ma détresse et les