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Page:Coignet - Aux Vieux de la vieille, 1853.djvu/83

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prier de m’envoyer un peu d’argent. La réponse fut longue à venir : pourtant elle arriva. Je reçus deux lettres à la fois. Elles n’étaient pas affranchies, et coûtaient trente sous chacune, trois francs à elles deux. N’ayant rien pour acquitter le port, j’empruntai l’argent à un vieux sergent de ma compagnie. Il se chargea en outre de me lire les deux missives. — Si tu étais plus près de moi, disait mon père, je t’enverrais de l’argent. Je ne peux rien faire pour toi, disait mon oncle, j’ai acheté des biens nationaux, il faut que je les paie. — Voilà quelles étaient les charmantes lettres que je reçus. Et moi, pour acquitter ma dette, je fus obligé plus tard, quand la trève eut cessé, de monter quatre gardes aux avant-postes, en sentinelle perdue, à raison de quinze sous par garde, et au risque de me faire égorger. Aussi, de ma vie je n’écrivis plus à mes grands parents.

Bonaparte quitta l’armée d’Italie. Nous étions alors sous les ordres du général Brune, un vaillant officier. Que la France en aie souvent de pareils ! Avec eux, les soldats pourront passer partout.

Notre demi-brigade fut réorganisée. On tira, dans le bataillon, le nombre de grenadiers nécessaires pour compléter notre compagnie. Tous les jours nous faisions des promenades militaires et des exercices. La discipline était sévère.

Mais combien nous aspirions au moment où finirait la trève pour rentrer en campagne. Quand cet heureux