À Brescia, nous trouvâmes l’armée rassemblée dans une belle plaine, Le général-en-chef nous passa en revue, et, dès le lendemain, nous partîmes pour prendre notre position sur les bords du Mincio. On avait fait de nombreux préparatifs de passage, et l’on s’était décidé pour un point de la rivière que dominaient de notre côté des montagnes très-élevées.
Le passage se fit à l’abri d’un village qui masquait nos troupes, si bien que l’armée autrichienne, malgré qu’elle fût en nombre considérable, ne pût s’y opposer. Mais, une fois sur l’autre rive, les troupes qui s’y étaient postées eurent à soutenir une terrible bataille. Elles furent battues à plate couture et forcées de se replier sur le Mincio avec d’énormes pertes. — Sans doute elles auraient été complètement culbutées si notre position, de ce côté-ci de la rivière, n’avait pas permis de les secourir et de tenir les Autrichiens en respect. Le général Suchet avait là, sur la montagne, cinquante pièces de gros calibre, dont les bordées, passant par-dessus nos colonnes, foudroyaient l’ennemi. C’était une grêle d’obus et de boulets qui pleuvait sans cesse dans leurs rangs.
Nos trois bataillons de grenadiers, restés sur la rive gauche du Mincio, assistaient immobiles à ce terrible spectacle. Nous étions désolés de ne pas pouvoir marcher au secours de nos camarades. Nous apercevions les moindres détails du combat, et nous n’y prenions aucune part !