Page:Coignet - Les Cahiers du capitaine Coignet, 1883.djvu/384

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mais vous ne sentirez de douleurs. — Je vous remercie, docteur. — Et vous, monsieur le bottier, voilà vingt francs. — Pas du tout, me dit-il. Mes déboursés seulement, s’il vous plaît. — Combien ? lui dis-je. — Dix francs. — Mais vous vous êtes entendus tous les deux. — Eh bien ! dirent mes deux camarades, prenons un punch au rhum. — Non ! dirent-ils, le temps est précieux, nous rentrons. Adieu, braves Français. »

Je suivis l’ordonnance du médecin, et jamais je ne m’en suis ressenti ; mais cela me coûta douze francs de fraises.

Je fus au palais prendre les ordres du comte Monthyon ; je trouvai là le prince Eugène et le prince Berthier. Le comte Monthyon dit au ministre de la guerre : « Je désire avoir pour aide de camp le vaguemestre Contant, et pour le remplacer, le lieutenant Coignet ; c’est un bon serviteur. J’ai besoin de lui pour faire disparaître toutes les voitures nuisibles à l’armée. »

Le ministre me nomma de suite vaguemestre du quartier général, le 28 décembre 1812. Je ne craignais plus de passer dans la ligne, mais on me réservait toujours les missions dangereuses[1].

  1. Je revenais toujours vainqueur de ma mission. L’Empereur me regardait comme un limier qu’il lâchait au besoin, mais il eut beau faire, je rentrais toujours et j’étais payé d’un regard gracieux qu’il savait jeter à la dérobée, car il était dur et sévère avec une parole brève, quoique bon. Aussi je le craignais et je tâchais toujours de m’éloigner de lui ; je l’aimais de toute mon âme, mais j’avais toujours le frisson quand il me parlait.