Page:Coignet - Les Cahiers du capitaine Coignet, 1883.djvu/385

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
346
les cahiers

Nous restâmes quelques jours à Kœnigsberg pour réunir tous les débris de cette grande armée réduite à un petit corps. Nous nous mîmes en marche sur Berlin qu’il fallut évacuer promptement pour nous retirer sur Magdebourg. Là, l’armée prit une petite consistance. Je reçus l’ordre de faire faire les plaques de fer-blanc avec écusson pour tous ceux qui avaient droit de conserver leurs voitures, et leurs noms et qualités devaient être sur les plaques ainsi que leur rang dans l’ordre de marche. Ces plaques coûtaient trois francs. Le vice-roi n’était pas exempt de cet ordre. Je n’eus que le temps nécessaire de faire poser toutes mes plaques avant de partir ; toutes celles qui n’auraient pas de plaques devaient être brûlées. Je me disais : « Je vais joliment débarrasser l’armée. »

Sur l’Elbe, le prince Eugène réunit l’armée dans une belle position ; il avait tout prévu : soins et attentions pour son armée, rien ne manquait. Il ne dormait pas ; les vivres se distribuaient la nuit ; il veillait à tout, il n’était pas trois jours sans se porter aux avant-postes pour reconnaître l’ennemi, et leur souhaiter le bonjour pendant trois mois, avec huit pièces de canon, 15,000 à 16,000 hommes d’infanterie, 700 à 800 de cavalerie. La petite frottée donnée, il commandait la retraite, marchant toujours le dernier ; jamais il ne laissait un soldat derrière lui. Et toujours gracieux ! quel joli soldat au champ