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j’oubliais la fuite des heures et l’appel du dîner ; la suavité de l’air et la sublimité de la création me nourrissaient ; c’était une convalescence à laquelle l’âme prenait une large part. Je vis le soleil se coucher au front du mont Gourzy et quelques étoiles apparaître au-dessus de la Montagne-Verte. Quand je me décidai à quitter le banc du kiosque, tout le ciel d’un bleu sombre scintillait de constellations ; la lune projetait son disque sur le sommet d’un bois ; les masses des montagnes se découpaient en brun sur le firmament. À mesure que je descendais, j’entendais un chant d’église venir jusqu’à moi ; quand je fus arrivée à la terrasse de l’établissement thermal, je vis la chapelle des Eaux-Bonnes, adossée à la base de la Butte du Trésor, tout éclatante de lumière.

Les montagnards qui célébraient le mois de Marie étaient agenouillés sur la place de la petite église ; les pâtres basques tenaient leur béret à la main et les vieilles paysannes inclinaient sur leur poitrine leur tête couverte d’un capulet ; hommes et femmes roulaient dans leurs mains un chapelet de buis. Même pour ceux qui ne prient pas de la même manière, cette foule prosternée, se détachant sur le fond lumineux de la chapelle éclairée, qui à son tour se dessinait sur la montagne verdoyante dominée