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qués dans le voisinage de Bayonne, ils ne pouvaient pénétrer dans la ville une fois le soleil couché, et, ainsi que l’avait décidé le concile d’Arles, ils portaient, comme signe d’infamie, une roue de drap jaune sur leur habit et une corne à leur bonnet. Il leur fut défendu d’établir des comptoirs et des boutiques à Bayonne d’où on les pourchassait à coups de pierre. Leur industrie et leur persistance triomphèrent de toutes les entraves ; peu à peu ils élevèrent leur petite cité et s’y enrichirent de génération en génération. Aujourd’hui, le bourg juif de Saint-Esprit est animé et bruyant, et ne s’humilie plus devant la ville dominatrice. Cependant des antipathies de race subsistent encore, mais sans querelles, et surtout. Dieu merci ! sans persécution. La nouvelle synagogue de Saint-Esprit, un monument d’assez mauvais goût, est adossée à la gare du chemin de fer. Le chemin de fer est le symbole du mélange de toutes les nationalités et de toutes les croyances !

Autrefois, c’était un pont de bateaux qui reliait le bourg de Saint-Esprit à Bayonne ; ce pont flottant ondulait, se balançait et parfois même avait des bonds effrayants lorsque la mer houleuse venait grossir le fleuve à la marée montante, ou bien lorsque le fleuve lui-même, grossi par ses nombreux affluents, se précipitait, à la fonte des neiges, vers son embouchure. Sur la lon-