Page:Colet - Les Derniers Marquis - Deux mois aux Pyrénées - 1866.djvu/236

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
— 222 —

de macarons, de chocolat et d’autres friandises ; des baraques où l’on tire des loteries ; des danseurs basques et espagnols ; des Africains d’Alger brûlant des pastilles du sérail ; des chanteurs, des joueurs d’orgues et de vieilles ; et le croisement des idiomes mêlés du Midi avec les sons tantôt aigres et tantôt graves ; enfin comme fond de tableau à tous ces bruits, à tout ce mouvement, le grand bruit et l’incommensurable agitation de la mer. On dirait la belle scène vivante du premier acte de la Muette de Portici.

Heurtée et assourdie, je traverse à grand peine la cour de l’Hôtel de France encombré de voyageurs. On ne peut me donner une chambre pour la nuit, mais l’hôtesse m’en promet une pour le lendemain, et, en attendant, elle me case dans une maison en face dont les fenêtres s’ouvrent sur la mer. À peine assise, j’oublie ma fatigue pour contempler ce spectacle de l’immensité des flots qui produit toujours en moi la double impression du ravissement et du vertige. La plage de Biarritz est superbe vue à cette lueur d’une chaude nuit d’été toute étoilée ; les grands rochers qui se dressent ou qui se courbent au milieu des brisants ressemblent à des fantômes de géants debout et couchés qu’enveloppe comme des linceuls la blanche écume des vagues. Je reste longtemps immobile devant cette fascination de la mer ; puis