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C’est dans ces dispositions heureuses que nous sortîmes pour faire notre promenade après le déjeuner, auquel la petite marquise ne parut point.

— Le marquis Sigismond, dit M. Routier, est parti dès l’aube pour une chasse lointaine. Madame Routier ajouta que la marquise était un peu souffrante. L’écolier manquait aussi au déjeuner, et nous pensâmes, Nérine et moi, qu’il avait suivi son cousin à la chasse.

Le visage du bel Italien, toujours si froid et si morose, trahissait ce matin-là une agitation et une inquiétude qui le coloraient par intervalles et le rendaient plus expressif. Sa toilette était plus soignée qu’à l’ordinaire ; il se leva de table après avoir pris une tasse de chocolat et deux verres de vin de Bordeaux ; sa démarche paraissait affermie ; on eût pu croire qu’il revivait ; lui aussi semblait subir l’influence de la température vivifiante qui nous pénétrait tous d’un souffle énergique.

Après le déjeuner, nous nous hâtâmes, Nérine et moi, d’aller chercher l’actrice ; et bientôt nous chevauchions toutes trois, sur la route des Eaux-Chaudes. Nos petits chevaux basques, fringants et doux, allaient d’un bon pas ; un guide nous précédait. Le gave aux flots écumeux rugissait à notre droite ; des rochers formidables s’élevaient à perte de vue au-dessus du chemin ; ils interceptaient pour