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oisive et maladive ? Le magistrat de Pau et l’ancien négociant breton ne se prêtaient guère par leur âge et leur gravité à ses agaceries ; l’employé du chemin de fer de Toulouse, quoique plus jeune, était toujours affublé d’une longue redingote qui lui donnait l’aspect d’un ministre protestant ; sa conquête aurait paru trop bourgeoise à la marquise ; restaient les deux Espagnols, M. Routier et l’écolier ; les deux Espagnols étaient assez jeunes et assez beaux pour la tenter, mais ils partaient dans trois jours, et ne savaient pas un mot de français. M. Routier était ennuyeux et uniforme comme une de ses fabriques de toiles peintes dont il parlait toujours pour en démontrer la belle ordonnance. Quant à l’écolier, il fuyait la compagnie de sa petite cousine, et s’attachait à nos pas le plus qu’il pouvait ; mais il la tenta tout à coup dans son dénûment, comme une proie qu’elle eût voulu mordre et bafouer ; elle l’avait déjà torturé dans les jours d’ennui de sa vie de château. Par lui, elle espérait d’ailleurs satisfaire la curiosité et l’envie instinctive que lui inspirait Nérine. Mais l’écolier, qui s’enflammait de plus en plus pour mon amie, resta inexpugnable aux pressantes attaques de la petite marquise, si bien qu’elle dut faire intervenir madame Routier, puis son mari, pour obliger Adolphe à l’accompagner à la promenade.