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heures des repas et quelquefois le soir quand Nérine lui accordait la grâce de venir prendre le thé chez elle. C’est alors qu’il nous racontait l’inquisition de son aimable cousine. Nérine en riait aux éclats et disait à l’écolier :

— Tant que votre parente n’exercera sa surveillance qu’envers vous, je la laisse faire, elle use de son droit ; mais si elle devenait agressive envers moi, gare à elle, je la pulvérise d’un mot.

Dans les premiers jours qui suivirent le départ du noble Italien, la petite marquise sembla se mettre à l’abri de cette menace secrète de Nérine ; désarçonnée par sa défaite amoureuse, elle avait à table et à la promenade une contenance presque accablée ; ce n’était plus la sémillante femme des premiers temps, elle ne songeait plus à nous écraser par ses toilettes et son babil, l’arc était détendu et chacun remarquait son affaissement ; mais insensiblement elle se roidit, et voulut rentrer en lice.

La température vivifiante des montagnes avait ranimé la beauté de Nérine en lui rendant un peu de santé, et la petite marquise s’indignait de la voir regardée et complimentée par le vieux magistrat et le vieux négociant, et par son mari même qui murmurait parfois :

— En vérité, elle a l’air fort noble.