Aller au contenu

Page:Collectif - La Vérité sur le différend sino-japonais, 1915.pdf/23

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Gustave Hervé écrivait en effet dans le leader de son journal « La Guerre Sociale », le 10 Mai 1915, sous le titre « Le Japon et la Chine » :

« Un grand journal français disait hier que le devoir de notre Gouvernement, c’était d’appuyer énergiquement le Japon dans ses revendications près du gouvernement chinois. À l’encontre de ce confrère, on me permettra d’affirmer que l’ultimatum du Japon à la Chine, avec les exigences qu’il contient a, dans tous les milieux républicains français, produit un infini sentiment de malaise et de tristesse.

« Personne n’a l’idée saugrenue, en France, de contester au Japon le droit de se tailler sur le marché chinois la place à laquelle sa proximité, son activité économique, son intelligence lui donnent tant de titres.

« Le Japon est notre allié ou, ce qui revient au même, l’allié de nos alliés anglais ; je n’oublie pas qu’en ce moment, il y a parmi nous une ambulance japonaise qui a traversé les mers pour venir prodiguer à nos blessés les soins les plus dévoués et les plus éclairés. C’est assez dire qu’aujourd’hui plus encore qu’hier, tout ce qui peut arriver d’avantageux au Japon nous est agréable. Et dès maintenant, malgré son accession récente à notre civilisation occidentale, il a donné de telles preuves de vitalité, d’intelligence et d’audace, que nous le considérons comme l’égal des plus grandes nations occidentales.

« Donc, qu’il se substitue aux Allemands dans toute la Chine, pour l’écoulement de tous ces produits manufacturés à bon marché que les Allemands étaient seuls à présenter au goût chinois avec la même ingéniosité ; qu’il les remplace dans la presqu’île du Chantoung d’où ses soldats, par la prise de Kiaotchéou et de Tsingtao, ont chassé les Allemands ; qu’il obtienne une situation privilégiée au point de vue économique dans la Mandchourie et la Mongolie orientale, qui ne sont que des colonies chinoises, nullement des pays chinois d’origine ; que dans la Chine proprement dite, il obtienne des concessions de mines et de chemins de fer, sous la loi chinoise, et qu’il ait l’assurance qu’aucune nation européenne ne viendra plus dépecer la Chine ; pas un Français qui n’y applaudisse des deux mains.

« Pas un, en revanche, qui n’ait éprouvé un étonnement douloureux en apprenant que le Japon entendait profiter de la faiblesse militaire de la Chine pour lui imposer, dans ses administrations civiles et militaires, des milliers de fonctionnaires japonais par qui la Chine ne serait plus qu’une annexe du Japon !

« Traiter ainsi la plus vieille et la plus populeuse nation du monde, l’une des plus civilisées de la terre, des plus instruites, des plus policées, la plus pacifique, au moment où, après trois siècles de stagnation, elle vient de se débarrasser de la dynastie mandchoue pour s’essayer au régime parlementaire et républicain, et s’ouvrir largement à la civilisation occidentale !

« Nous rêvons, nous, ici, de profiter du grand cataclysme qui ensanglante l’Europe pour affranchir toutes les nations opprimées. Nous appelons les Polonais, les Roumains, les Serbes, les Italiens de Trente et de Trieste à la délivrance. Nous nous promettons,