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LE NAIN DE BEAUVOISINE.

charmans demeurés frais, veloutés, gracieux, imprégnés de parfums d’une indéfinissable volupté ! Il y a des heures qui rafraîchissent toute l’existence : c’était une de ces heures toute grâce, toute harmonie, où l’on sent l’univers d’aplomb, où rien ne meurt, on le croirait à la joie profonde qui dilate l’âme. Je vivais long-temps par minute dans cette ville qui dort au bout d’une ville en délire ; délire de vendre, d’acheter, de se ruiner ou de s’enrichir. Je n’y pensais pas tant qu’à cette heure où je m’en ressouviens ; ô mon Dieu non ! j’avais trop à faire de goûter cette halte de toutes choses : j’étais bien dans la ville qui dort !

Mes regards montaient sans entraves aux toits gothiques des maisons d’en bas, où se rassemblent les phalanges de pigeons, dont le doux négoce est de gémir de joie et d’amour sur les hautes cheminées : le mois de mai en suspendait les haleines étouffantes. Pas une vapeur dans l’air, sinon une es-