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CHAPITRE XIV


Le chemin le plus court pour aller au jardin à fleurs en quittant le salon, était de prendre par le petit taillis que vous connaissez déjà. Pour l’intelligence de ce qui va suivre, il faut que vous sachiez que ce sentier était la promenade favorite de M. Franklin. Lorsqu’il restait aux alentours de la maison, c’était là que nous étions presque toujours sûrs de le trouver.

Il faut que je m’accuse d’être un vieil entêté. Plus le sergent s’obstinait à me cacher sa pensée, plus j’étais décidé à essayer de la pénétrer. Comme nous entrions dans le taillis, je cherchai à le circonvenir d’une autre manière.

« Dans l’état où les choses paraissent être à l’heure qu’il est, dis-je, je me sentirais, à votre place, au bout de mon latin !

— Si vous étiez à ma place, repartit le sergent, vous vous seriez déjà formé une opinion, et dans l’état actuel des choses, les doutes que vous auriez pu concevoir seraient levés. Ne vous inquiétez pas du résultat possible de mes réflexions, monsieur Betteredge. Je ne vous ai pas amené pour que vous cherchiez à me faire parler, mais bien dans le but de tirer de vous quelques informations. Vous auriez pu, sans doute, me les fournir dans la maison tout aussi bien qu’ici, mais les portes ont souvent des oreilles et, dans notre profession, nous avons un goût décidé pour le grand air. »

Qui aurait pu circonvenir ce diable d’homme ? J’y renonçai et me préparai à l’écouter aussi patiemment que je le pourrais.

« Nous ne discuterons pas les motifs de votre jeune dame, continua le sergent ; nous dirons seulement que c’est grand dommage qu’elle refuse de m’aider, parce qu’en agissant ainsi, elle augmente de beaucoup les difficultés de l’investigation. Il s’agit maintenant de pénétrer de quelque autre manière le mystère de l’accident de la porte, mystère qui,