dence de me rappeler à elle. Et pourtant, malgré tout, je conservais ma foi en miss Rachel. Si le sergent Cuff eût été Salomon en personne, et qu’il eût accusé ma jeune maîtresse d’être mêlée à cette basse et vile intrigue, je n’aurais eu qu’une réponse au service de Salomon, tout sage qu’il était : « Vous ne la connaissez pas, tandis que moi je la connais. »
Mes réflexions furent interrompues par Samuel, qui m’apportait un message écrit de la part de ma maîtresse.
Comme je rentrais dans la maison pour le lire à la lumière, Samuel observa que le temps allait changer, ce que mon esprit troublé m’avait empêché de remarquer plus tôt. Maintenant que mon attention était attirée là-dessus, j’entendis bien les chiens se démener, et le vent sifflant déjà ; je regardai le ciel, il était chargé de nuages noirs, qui couraient avec une vitesse croissante sur une lune mouillée : Samuel avait raison, un orage menaçait.
J’appris par le billet de lady Verinder que le magistrat de Frizinghall lui avait écrit pour rappeler à son attention les trois Indiens. Ces coquins devaient être relâchés au commencement de la semaine, et laissés libres de suivre leurs mauvaises inspirations. Si nous avions à les interroger de nouveau, il ne restait pas de temps à perdre. Ma maîtresse avait oublié de parler de cet incident au sergent, et elle me priait de réparer son omission. Les Indiens étaient complètement sortis de ma mémoire, et sans doute de la vôtre. Je ne voyais guère d’utilité à m’occuper d’eux ; pourtant, je suivis sur-le-champ mes instructions.
Je trouvai le sergent et notre jardinier en face d’une bouteille de whisky écossais, et absorbés par une discussion sur les roses ; le sergent y mettait un tel feu que, quand j’entrai, il me fit signe de ne pas l’interrompre. Autant que je pus le comprendre, le débat roulait sur la question de savoir si la rose mousseuse blanche a besoin, pour bien réussir, d’être greffée sur églantier. M. Begbie disait oui, le sergent disait non. Ils en appelèrent à moi avec une vivacité juvénile.
Dans mon ignorance absolue du point en litige, je pris un terme moyen, ainsi que le font les juges de Sa Majesté, lorsque l’arrêt à rendre les embarrasse et que leur jugement tient à un fil ; je répondis ; « Messieurs, il y a beaucoup à dire