Page:Collins - La Pierre de lune, 1898, tome 1.djvu/27

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

puis, s’adressant à l’enfant, leur chef reprit : « Vois-tu le seigneur anglais qui vient de l’étranger ? » L’enfant répondit : « Je le vois. »

L’Indien demanda : « Est-ce sur le chemin de cette maison que voyagera aujourd’hui l’Anglais, et ne voyagera-t-il sur aucun autre ? »

Le garçon répond : « Oui, sur cette route et sur aucune autre. »

Alors l’Indien, après quelques moments de silence reprend : « Le seigneur anglais l’a-t-il sur lui ? » Après avoir à son tour laissé passer un instant, l’enfant dit : « Oui. »

Enfin le jongleur pose une troisième et dernière question : « Le voyageur anglais viendra-t-il ici aujourd’hui, et vers la chute du jour, comme il l’a promis ? »

L’enfant reprend : « Je ne puis le dire. »

L’Indien demande : « Et pourquoi ? »

Le petit ajoute : « Je suis fatigué, le brouillard s’élève dans ma tête, et me déroute ; je ne puis plus rien voir en ce moment. »

Ainsi finit cet interrogatoire mystérieux.

L’Indien parla à ses compagnons dans leur langue : il désignait le jeune garçon, et indiquait du geste la ville, où, comme nous le découvrîmes plus tard, ils étaient logés. Enfin, après quelques passes, il souffla sur le front de l’enfant, et celui-ci s’éveilla en sursaut. Ils s’acheminèrent ensuite tous ensemble vers la ville, et les jeunes filles ne les virent bientôt plus.

Toute chose contient, dit-on, sa moralité, pour peu qu’on se donne la peine de la chercher. Quelle était la morale de tout cela ?

Je pensai, premièrement, que le jongleur en chef avait entendu parler de l’arrivée de M. Franklin par les serviteurs du dehors, et qu’il cherchait à attraper de lui quelque argent.

Deuxièmement, que dans ce but, lui et ses acolytes, voulaient rôder sur le domaine, guetter le retour de Milady, et lui annoncer l’arrivée de M. Franklin, sous couleur de sorcellerie ; troisièmement, que Pénélope les avait surpris répétant leurs rôles pour la farce à jouer ; quatrièmement, que je ferais bien de veiller ce soir sur l’argenterie ; cinquiè-