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quotidien dès que j’arriverai au moment où la Pierre de Lune devint l’occupation principale de tout le monde dans la maison.

Je reprends au lendemain matin (26) de ma trouvaille dans l’allée. Je montrai à M. Franklin cette pièce de conviction, et lui racontai comment j’en étais devenu possesseur. Son opinion fut que non-seulement les Indiens poursuivaient la recherche du diamant, mais encore qu’ils avaient la niaiserie de croire à leurs jongleries, entre autres à celle de l’encre versée sur la main de leur jeune acolyte, dans l’espoir qu’il verrait ainsi les personnes et les objets qui dépassaient la portée de la vision humaine.

À ce que m’apprit M. Franklin, chez nous aussi bien qu’en Orient, il y a des gens qui pratiquent ces momeries, sans addition d’encre magique, toutefois ; ils appellent cela d’un nom français qui signifie quelque chose comme le don de seconde vue.

« Croyez-le bien, ajouta M. Franklin, les Indiens étaient convaincus que le diamant reposait ici, entre nos mains, et ils avaient amené leur jeune voyant afin d’être bien renseignés par lui sur le lieu précis ou se trouvait le diamant dans le cas où ils seraient parvenus à pénétrer la nuit dernière dans la maison.

— Pensez-vous qu’ils tenteront d’y entrer de nouveau, monsieur ? dis-je.

— Cela dépend, répondit M. Franklin, du degré d’initiation du jeune garçon ; s’il peut apercevoir le diamant enfermé à l’abri de toute atteinte dans la caisse de la banque de Frizinghall, nous ne serons plus, pour le moment, troublés par les visites des Indiens ; s’il ne possède pas le don de seconde vue, nous avons plus d’une chance de les revoir ou de les attraper dans le taillis, et cela avant peu. »

J’attendais donc et avec assez d’intrépidité une nouvelle apparition ; mais, chose étrange, elle n’eut jamais lieu.

Soit que les jongleurs eussent appris en ville la visite de M. Franklin à la Banque, et qu’ils en aient tiré leurs conclusions ; soit que l’enfant eût réellement vu le diamant et ses pérégrinations, ce que pour ma part je ne croirai pas un seul instant ; soit enfin que le hasard seul s’en mêlât, nous n’aperçûmes plus l’ombre d’un Indien pendant les semaines