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PERDU DANS LA FORÊT

course que j’avais faite. En supposant que je m’étais aventuré dans une fausse direction, je pouvais bien être à cinq ou six milles de la maison. Je savais qu’on devait y être très inquiet sur mon compte et qu’on serait aux aguets au cas où je ferais un signal. Faire brûler un gros bouleau, si l’on en trouve un à portée, est un excellent moyen de donner un signal, mais il se fit qu’il n’y en avait pas autour de moi ; alors je songeai à tirer du fusil. Ma corne à poudre était encore presqu’à la moitié pleine, ce qui représentait dix-huit ou vingt charges. En conséquence, je chargeai mon fusil et tirai trois coups de suite.

J’eus à peine tiré, qu’un très fort coup de fusil me répondit, puis un autre, puis enfin survinrent des cris. Je repris mon fusil et mon gibier et partis dans la direction du bruit. D’autres cris se firent entendre par-ci par-là, jusqu’au moment où je rencontrai mon père et deux employés du poste, avec des lanternes, qui s’en venaient sur notre chemin de bois.

Ils avaient, en effet, été en proie à une grande anxiété sur mon compte, croyant qu’il m’était arrivé quelqu’accident ; mais où me trouver ? Tel était leur problème. Alors, ils avaient décidé d’attendre un signal de ma part. Ils avaient bien fait entendre le son du cor par intervalles, mais ça n’était pas parvenu à mes oreilles, et mon père n’avait pas voulu que l’on tirât des coups de fusil, craignant que l’écho pourrait m’induire en erreur quant à leur direction.

Le lendemain, je constatai que j’avais dû suivre une voie assez directe, car l’endroit où j’avais allumé mon feu n’était qu’à environ un quart de mille du poste. Eus-je marché quelques minutes de plus, j’aurais débouché sur le chemin de bois ou à la maison.

Je dois avouer que pendant quelque temps, je me sentis pas très rassuré, mais je ne m’étais pas effrayé, et si l’on n’avait pas répondu à mes coups de fusil, je