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léopold de saussure

arbitrairement composés, les uns de 2 étoiles seulement, les autres de 3, 4, 5 étoiles, parfois davantage.

Une telle coïncidence ne saurait être fortuite ; aussi bien la commune origine de ces systèmes n’a-t-elle jamais été mise en doute. Les seules divergences qui se sont produites dans la discussion de ce zodiaque n’ont porté que sur son lieu d’origine et sur l’époque où il s’est répandu en diverses contrées de l’Asie.

Puisque ce zodiaque apparaît à la fois dans la haute antiquité chinoise (aux environs du XXIIIe siècle) et dans la haute antiquité hindoue (littérature védique), il semble que, depuis un demi-siècle déjà, la critique historique aurait dû admettre que sa diffusion datait d’une époque très ancienne. Mais les discussions scientifiques, lorsqu’elles impliquent plusieurs sortes de compétence, donnent parfois le spectacle d’une singulière incohérence. Celle qui s’engagea sur ce sujet est bien l’exemple le plus surprenant que l’on puisse citer d’une série invraisemblable de malentendus et de coq-à-l’âne.

Un grand physicien et astronome français, J.-B. Biot, après avoir clairement établi les traits essentiels de l’antique astronomie chinoise, crut devoir contester la valeur des traditions védiques sur le zodiaque lunaire et affirmer que les Hindous avaient emprunté ce zodiaque aux Chinois à une époque relativement récente.

Deux indianistes, Weber et Whitney, lui répondirent. Mais au lieu de se borner à rétablir les faits en ce qui concerne l’authenticité des documents védiques, ils tombèrent dans la même faute que Biot en s’aventurant dans un domaine étranger à leur compétence : ils crurent devoir contester, à leur tour, la valeur des textes chinois, sous le prétexte qu’en l’an 213 avant J.-C., l’empereur Ts’in che hoang ti ordonna la destruction des livres antiques[1].

  1. Cet acte regrettable ne fut pas d’un barbare et peut se comparer à celui de Luther brûlant solennellement les bulles papales. Ts’in fut un Pierre-le-Grand chinois. Il employa ce remède énergique pour assurer sa grande réforme unitaire et briser les résistances de l’esprit traditionaliste.