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Page:Comptes-rendus des séances de l’année 1928.djvu/187

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COMMERCE DU PAPYRUS EN GAULE

à-dire d’une écriture à main posée à une écriture courante et rapide peut être considérée comme une conséquence de ce fait. La cursive répond à une civilisation où l’écriture est indispensable à la vie de la collectivité aussi bien qu’à celle des individus ; la minuscule est une calligraphie appropriée à la classe lettrée au sein de laquelle l’instruction se confine et se perpétue[1]. Il est hautement significatif de constater que la cursive reparaîtra à côté d’elle dans la première moitié du xiiie siècle, c’est-à-dire précisément à l’époque où le progrès social et le développement de l’économie et de la culture laïques, généraliseront de nouveau le besoin de l’écriture.

Ce que nous pouvons savoir du commerce de papyrus dans la Gaule mérovingienne apporte à ces observations une confirmation assez intéressante.

Il est inutile de revenir ici sur ce que les diplomatistes et les paléographes nous ont appris de l’emploi du papyrus dans la chancellerie des rois mérovingiens et pour la confection des actes privés. Bornons-nous à rappeler que l’on se servit exclusivement de papyrus pour l’expédition des actes royaux jusque sous Clotaire III, et que c’est seulement entre 659 et 677 ou 679, qu’eut lieu la substitution

    survécurent à la chute de l’Empire. L’enseignement y est encore tout laïque et le contraste est éclatant, à cet égard, avec la situation qu’il présente à partir du viiie siècle. Voy. Grégoire de Tours, Historia Francorum, IV, 46, VI, 9, X, 31 ; Vitae Patrum, 20 ; la Vie de S. Didier, éd. Poupardin, p. 2 ; la Vita Boniti, Script. Rer. Merov., t. VI, p. 121. Les Epistolae austriacae, publiées ibid., t. III, contiennent de nombreuses lettres de laïques. Les femmes elles-mêmes participaient à la culture littéraire. Voy. la Vie de S. Didier, loc. cit., p. 10. Sur l’école de Toulouse, où enseigne le grammairien Virgilius, voy. A. Ernault, De Virgilio Marone, Paris, 1886. Cf. D. Tardi, Bulletin Ducange, 1927, p. 22 et suiv.

  1. Il est intéressant de constater que l’Irlande, qui reçut l’écriture avec la culture latine mais qui ne participa point à la civilisation romaine et chez laquelle l’instruction fut, dès le début, exclusivement confinée dans le clergé, n’adopta jamais la cursive et ne se servit que de la semi-onciale qu’elle transforma. Voir Prou, Manuel de paléographie, 4e édit., p. 98.