Page:Conan - Angéline de Montbrun, 1919.djvu/182

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connu personne dont la gaieté se prît si vite.

Mais ce soir-là quelque chose de solennel m’oppressait. Je me sentais émue sans savoir pourquoi. Tout ce que je lui devais me revenait à l’esprit. Il me semblait que je n’avais jamais apprécié son admirable tendresse. J’éprouvais un immense besoin de le remercier, de le chérir. Minuit sonna. Jamais glas ne m’avait paru si lugubre, ne m’avait fait une si funèbre impression. Une crainte vague et terrible entra en moi. Cette chambre si jolie, si riante me fit soudain l’effet d’un tombeau.

Je me levai pour cacher mon trouble et m’approchai de la fenêtre. La mer s’était retirée au large, mais le faible bruit des flots m’arrivait par intervalles. J’essayais résolument de raffermir mon cœur, car je ne voulais pas attrister mon père. Lui commença dans l’appartement un de ces va-et-vient qui étaient dans ses habitudes. La fille du Tintoret se trouvait en pleine lumière. En passant, son regard tomba sur ce tableau qu’il aimait, et une ombre douloureuse couvrit son visage. Après quelques tours, il