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ÉLISABETH SETON

moi, je ne pus supporter, pour la première fois de ma vie, les douces caresses de mes enfants chéris. »


Ces tortures d’esprit avaient usé les forces de Mme Seton ; elle n’était plus que l’ombre d’elle-même, un squelette, disait-elle.

L’espérance l’avait abandonnée ; et, ne croyant pas possible d’arriver à la lumière, elle prit la triste résolution de cesser toute recherche, toute étude religieuse, et de ne plus s’attacher jusqu’à sa mort à aucune religion.

Quelques jours plus tard, Mme Seton se trouvait seule un soir, à son foyer.

C’était le 6 janvier. Chez les protestants, l’Épiphanie est une grande fête ; et, amèrement désolée, Élisabeth sondait le vide affreux que l’absence de tout culte avait fait dans sa vie.

Longtemps elle resta ainsi, se demandant ce qu’elle allait devenir, comment elle pourrait supporter l’existence.

Un volume de Bourdaloue se trouvait à portée de sa main. Par un retour presque machinal aux pieuses habitudes du passé, elle le prit et l’ouvrit précisément au sermon de l’Épiphanie, au passage admirable où l’orateur retrace l’épreuve qui fut imposée aux Mages, par la disparition de l’étoile.

Elle lut ces pages qui semblaient écrites pour elle ; et le conseil de s’adresser aux prêtres que Bourdaloue donne à ceux qui ont perdu la foi l’impressionna comme un ordre venu d’en haut. Sur l’heure, elle écrivit à l’abbé de Cheverus dont elle avait souvent entendu parler et qui était alors à Boston. « Si M. de Cheverus n’eût écouté que l’inspiration de son zèle, il serait parti à l’instant pour New-York, » dit l’historien de sa vie. N’osant risquer cette démarche, il invita Mme Seton à lui soumettre par écrit ses difficultés. Elle le fit : et les réponses du proscrit apôtre dissipèrent ses doutes.