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PHYSIONOMIES DE SAINTS

SAINT CAMILLE DE LELLIS


« Toute mauvaise action », a dit un grand écrivain, laisse en notre cœur d’immondes racines, qu’il faut arracher avec des tenailles ardentes ».

Que dire donc des habitudes criminelles ?

Ne dévorent-elles pas fatalement tout ce qu’il y a de bon dans l’âme ?

Ne sont-elles pas une chaîne ignoble qu’il faut traîner jusqu’à la tombe ?

On le dirait.

On dirait qu’il n’y a pas d’esclave plus asservi que le pécheur d’habitude.

Pourtant les habitudes mauvaises — même contractées dès l’enfance — n’empêchent pas d’arriver à la sainteté. La vie de Camille de Lellis le prouve, elle prouve aussi que les rechutes ne doivent point décourager.

L’héroïque servant des malades, le fondateur des Frères du bien mourir ne rompit point d’un coup ses honteuses chaînes.

Loin de là. Plusieurs années durant, il lutta faiblement contre lui-même et la force de l’habitude triompha bien des fois de ses résolutions. Cependant ce libertin, ce joueur est devenu saint Camille de Lellis.

Il naquit en 1550, dans une petite ville des Abruzzes. Sa mère mourut quand il était encore au berceau, et son père, qui était officier, négligea fort son éducation. Il envoya pourtant son fils à l’école. L’enfant y apprit à lire et à écrire, mais, abandonné à lui-même, il se lia avec de jeunes vauriens et fit des jeux de dés et de cartes son occupation principale.

À dix-huit ans, Camille de Lellis embrassa la carrière des armes. Passionné pour le jeu au-delà de tout ce qui se peut dire, il ne tarda pas à perdre aux cartes toute sa fortune et, au bout de trois ans, un ulcère à