Page:Condillac - Essai sur l’origine des connaissances humaines, Mortier, 1746, tome 1.djvu/161

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CHAPITRE X.

Où l’imagination puise les agrémens qu’elle donne à la vérité.

§. 89. L’imagination emprunte ses agrémens du droit qu’elle a de dérober à la nature ce qu’il y a de plus riant & de plus aimable, pour embellir le sujet qu’elle manie. Rien ne lui est étranger, tout lui devient propre, dès qu’elle en peut paroître avec plus d’éclat. C’est une abeille, qui fait son trésor de tout ce qu’un parterre produit de plus belles fleurs. C’est une coquette, qui, uniquement occupée du desir de plaire, consulte plus son caprice que la raison. Toujours également complaisante, elle se prête à notre goût, à nos passions, à nos foiblesses. Elle attire & persuade l’un par son air vif & agaçant, surprend & étonne l’autre par ses manières grandes & nobles. Tantôt elle amuse par des propos rians ; d’autres fois, elle ravit par la hardiesse de ses