Page:Condillac - Essai sur l’origine des connaissances humaines, Mortier, 1746, tome 1.djvu/78

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occasions, l’esprit ne se rappelle que les noms de pied, de toise, etc. Avec une idée de grandeur d’autant plus vague, que celle qu’il veut se représenter est plus considérable.

Avec le secours de ces premières idées, nous pouvons, en l’absence des objets, nous représenter exactement les figures les plus simples : tels sont des triangles & des quarrés. Mais, que le nombre des côtés augmente considérablement, nos efforts deviennent superflus. Si je pense à une figure de mille côtés, & à une de neuf cent quatre-vingt-dix-neuf, ce n’est pas par des perceptions que je les distingue ; ce n’est que par les noms que je leur ai donnés. Il en est de même de toutes les notions complexes. Chacun peut remarquer que, quand il en veut faire usage, il ne s’en retrace que les noms. Pour les idées simples qu’elles renferment, il ne peut les réveiller que l’une après l’autre ; & il faut l’attribuer à une opération différente de la mémoire.