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CORRESPONDANCE


et il disait à un de ses confidents : « L’incrédulité a pénétré jusque dans l’assemblée. Je ne vois plus pour la religion d’appuis fidèles que M. l'archevêque, mon frère et Fréron. » Car Fréron a l’intendance des petits dogues qu’on élève contre la philosophie ; il les dresse à aboyer, et il les enivre, mais ce n’est pas de gloire.

Papillon Philosophe [1] voit bien mauvaise compagnie s’il voit des gens qui vous attribuent le Bon sens [2]. C’est comme les écoliers à qui les colporteurs disent que les turpitudes qu’ils leur apportent sont de vous, pour les vendre un écu de plus. Jamais les gens censés ou sensés n’ont entendu parler de ces imputations. On vous reproche au contraire d’avoir trop crié contre les athées. Je conviens qu’ils ont eu tort d’écrire des déclamations, et de les écrire très-longuement. Je conviens que s’il est dangereux que le déisme ne mène à la superstition, il était inutile de le dire, à présent qu’il est question d’aller de la superstition vers le déisme. Je conviens que c’est une grande maladresse de vouloir faire dépendre la chute d’une superstition absurde et sanguinaire de la décision d’une question de métaphysique qui demeurera obscure encore longtemps, et peut-être toujours. Mais les athées sont sous le couteau, et le couteau qui les égorgerait se plongerait bientôt dans le sang des déistes ; et si on permettait de recherchiez les athées, Christophe de Beaumontet

  1. Madame de Saint-Julien.
  2. Le Bon sens, ou Idées naturelles opposées aux idées surnaturelles, par le baron d’Holbach.