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A L’ACADÉMIE FRANÇAISE.


ment le plus universel et le plus utile que l'esprit humain ait inventé dans les sciences, j’aurais peint un grand géomètre ; mais ces traits lui seraient communs avec d’autres hommes qui ont illustré notre siècle. Ce qui caractérise surtout M. D’Alembert, c’est d’avoir inventé un nouveau calcul nécessaire aux progrès des sciences physiques, tandis que les calculs de Newton et de Leibnitz semblaient avoir atteint le terme des forces de l’esprit humain ; c’est d’avoir saisi dans la nature un principe général et nécessaire, auquel tous les coips sont également assujettis, et qui détermine leurs mouvements ou leurs formes dès qu’on connaît les forces qui agissent sur leurs éléments ; c’est d’avoir tracé le premier la ligne que l’axe de la terre décrit dans les cieux, et calculé les causes qui, en le balançant dans l’espace, lui font accomplir sa longue période, dont elles conservent la lente et paisible uniformité ; c’est, enfin, d’avoir illustré son nom par plusieurs de ces grandes découvertes qui survivent aux ouvrages de ceux qui les ont faites, aux méthodes même qui les ont produites, et sont éternelles comme les lois de la nature dont elles ont révélé le secret.

Les sciences se tiennent par une chaîne qui unil chacune d’elles à toutes les autres, et au point où elles se rapprochent, elles se prêtent des secours mutuels. Souvent les mathématiques ne peuvent attendre que d’une saine métaphysique la solution des difficultés qu’elles présentent, tandis que la métaphysique a besoin de la science du calcul pour ne point s’égarer dans ses méditations sur la nature de